dimanche 7 août 2011

Il faut plus que de la réhabilitation et de la résidentialisation

Un très récent article du Monde montre le désenchantement des habitants de la Courneuve après le programme de l'ANRU. Son impacte sur l'économie délictueuse semble marginale.


"Le raisonnement a été le même pour toutes les barres démolies, depuis 1986, à La Courneuve, explique Stéphane Troussel, président de l'Office public de l'habitat de Seine-Saint-Denis, conseiller général (PS) et conseiller municipal de la ville. On était arrivé à un tel niveau de dégradation du bâti, à un tel niveau d'insécurité, qu'on ne pouvait pas faire du positif sans détruire." Construites dans les années 1960 pour accueillir les rapatriés d'Algérie et les Parisiens les plus pauvres, les grandes barres des 4 000 se sont détériorées en à peine dix ans : étanchéité, isolation, insalubrité... Puis les trafics ont commencé à polluer la vie des locataires dans les années 1980. La barre maudite fut d'abord Debussy. Elle disparut en 1986. Deal et délabrement, mêmes maux, même traitement : en 2000, Renoir implosait, et en 2004, Ravel et Presov. Le trafic de drogue, lui, se renforçait encore rue Balzac. La mort de Sid-Ahmed, 11 ans, tué par une balle perdue le 19 juin 2005 au pied de la barre, et la promesse, le lendemain, du ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy de "nettoyer la cité au Kärcher" érigeaient la barre en symbole du mal de vivre dans les grands ensembles français.

Six ans plus tard, les trafiquants sévissent toujours. Et les habitants, échaudés par l'effet des démolitions précédentes, n'osent plus rien espérer de la nouvelle. "Cela va embellir le quartier, mais ça ne va pas changer en profondeur. Les dealers vont s'installer ailleurs. C'est comme changer un toboggan de place, les enfants se déplacent, ils n'arrêtent pas de jouer", prédit, philosophe, une riveraine.

"Démolir une barre ne résout pas fondamentalement les problèmes de société et d'insécurité auxquels nous sommes confrontés, explique Gilles Poux. Pour démanteler ces trafics, il faut que la police ait des moyens : il ne suffit pas d'interpeller ceux qui sont là pour quelques grammes de shit ou de trouble à l'ordre public. Ils sont relâchés dans les vingt-quatre heures. L'opération réussie de 2010, c'est le résultat d'un an d'enquête ! Or, ici, nous n'avons même pas assez d'officiers de police pour collecter correctement les plaintes !" Sollicitée à plusieurs reprises, la police a refusé de s'exprimer.


A La Courneuve, les barres tombent, les dealers restent
 le Monde du 30.07.11 

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